Cela fait quelques années que je réclame que l'on regroupe tous les patients vulnérables sous une appellation officielle : "patients fragiles". Pourquoi? Même si la prise en charge existe déjà en France pour les personnes vulnérables il me semble que ce serait une avancée de plus si nous allions jusqu'à adopter le statut de "patient fragile" de la naissance jusqu'à la mort en distinguant bien-sûr les états en les graduant comme on le fait aujourd'hui dans l'appréciation de la dépendance avec les "Groupes Iso-Ressource" en gériatrie.
Nous pourrions distinguer les états "définitifs" lorsqu'un patient se trouve dans un état de vulnérabilité à vie comme par exemple un bébé qui nait avec une trisomie 21 ou atteint d'une mucoviscidose ou les états "transitoires" comme par exemple la survenue d'un cancer, d'un deuil lourd, d'une dépression pathologique, etc.
Les prises en charge sont différentes en fonction de la nature de la fragilité mais l'objectif reste le même. Aider le patient mais aussi accompagner l'aidant familial dans chaque difficulté (administrative, professionnelle, psychologique, familiale, etc)
D'un point de vue philosophique il n'y a pas de sens à distinguer les patients de façon chronologique en fonction de l'âge. La souffrance est la même quelque soit l'âge et toute vie à la même valeur. Simplement les approches sont différentes chez l'enfant, chez le jeune adulte et chez l'adulte âgé.
C'est pourquoi j'ai créé le mot "fragilologie" qui peut aussi se lire "fragile au logis". Je suis gérontologue mais je ne le suis pas devenu par passion pour le grand âge. Je le suis devenu par passion pour la solidarité. En tant que gérontologue je porte le même regard sur le vieillard en long séjour que sur ce jeune homme de 17 ans renversé par une voiture, devenu tétraplégique. Mon devoir d'assistance est le même.
Je souhaiterais de tout mon coeur que cette idée fasse son chemin jusqu'au bureau de notre ministre de la santé pour faire de cette idée une cause nationale.
Je suis sidéré d'entendre mes enfants parler d'un camarade en le qualifiant de "fragile" ce qui signifie dans leur bouche qu'il est "faible" et donc "inférieur". Nous vivons dans un monde où la compétition de chacun contre chacun a fait oublier que la "mutualité" et la "solidarité" ont permis a certain primates de devenir des hommes debout. Lorsque les chasseurs cueilleurs revenaient de chasse du temps des hommes des cavernes la récolte était partagée. Ainsi celui qui revenait bredouille par malchance pouvait aussi se nourrir. Cette mutualité a permis au groupe de mutualiser les risques et d'être plus fort face à l'adversité. C'est le vrai sens du darwinisme que l'on confond souvent avec le "struggle for life". Darwin explique que l'adaptation se fait par la coopération.
Quand les espèces coopèrent alors elles s'adaptent plus facilement. Prendre en charge la fragilité c'est s'adapter mieux tous ensemble aux aléas de la vie. Ce n'est pas seulement une question morale, c'est une question de survie de l'espèce toute entière. Si demain notre environnement venait à rendre la vie sur terre plus difficile, c'est la solidarité, la partage et le renoncement à l'individualisme qui permettra de trouver des solutions.
Je propose donc la création de diplômes de fragilologues allant jusqu'au master pour se substituer petit a petit au terme de gérontologue qui est souvent confondu avec celui de gériatre. La fragilologie doit être enseignée aux soignants, aux aides sociales, aux aidant familiaux, etc. Elle devra enseigner l'approche de la fragilité sous l'angle de la maladie, du handicap, de la philosophie, de la vie dans la cité. Elle devra permettre d'avoir une base commune afin d'agir de la même façon pour tous les patients fragiles dans le but d'améliorer la qualité de vie et de santé et de trouver des innovation économiques pour tous ces patients avec la création de nouveaux services.
Voici mon site : Fragilologie
Merci d'apporter vos commentaires et de partager avec les personnes qui pourraient m'aider à faire de ce projet une réalité.